Justice. La Cour Européenne des Droits de l’Homme doit décider si la loi islamique peut s’appliquer aux musulmans grecs.
C’est un cas en apparence insignifiant mais dont l’issue pourrait créer un précédent inouï. La Cour Européenne des Droits de l’Homme a tenu audience mercredi sur l’application de la charia dans un contentieux en Grèce. En cause, deux traités de 1920 et 1923 qui soumettent les minorités musulmanes à la frontière turque aux coutumes et aux textes de la loi coranique.
Tout commence comme une banale querelle de succession. À la mort de son mari, Mme Molla Sali, ressortissante grecque, hérite de tous ses biens, comme le prévoit son testament. Mais les deux sœurs du défunt contestent l’héritage : leur frère faisait partie de la communauté musulmane de Thrace, à la frontière turque. Or, le traité de Lausanne de 1923, qui trace la frontière entre Grèce et Turquie, prévoit l’application de la charia aux musulmans passés sous contrôle grec. Pour les deux sœurs, le testament a beau avoir été rédigé par un notaire, il est invalide devant la loi d’Allah : le magot de la veuve doit leur revenir.
La justice grecque a préféré la charia à son propre code civil
Une bataille juridique s’engage et donne d’abord raison à Mme Molla Sali par deux jugements successifs. Mais coup de théâtre quand l’affaire passe devant la Cour de cassation grecque, celle-ci énonce que c’est au mufti religieux de régler la succession, selon les règles de la loi islamique. La hiérarchie judiciaire embraie, écarte le Code civil au profit des règles de l’islam, et Mme Molla Sali n’a plus qu’à porter l’affaire la Cour Européenne des Droits de l’Homme.
Après l’audience d’hier auprès de la Grande Chambre, la CEDH va devoir trancher entre loi sacrée coranique et droit civil européen, au risque de déclencher une déflagration, et un précédent pour tous les pays qui possèdent une minorité musulmane. Aucune date de jugement n’a encore été communiquée.
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